A lire
L’Apprenance – Vers un nouveau rapport au savoir
Philippe Carré Dunod 2005
Économie du savoir, société cognitive, formation tout au long de la vie… L’acquisition de connaissances et de compétences nouvelles devient le levier majeur de l’adaptation et du développement des individus, des organisations et des nations du XXI° siècle. Le désir et la capacité d’apprendre sont en passe de devenir les compétences-clés du » travailleur du savoir » et du citoyen de demain. La notion d’apprenante illustre ce nouveau rapport au savoir dans ses différentes déclinaisons : vouloir apprendre, savoir apprendre, pouvoir apprendre. Cet ouvrage propose un état de la question de la société cognitive aujourd’hui, avant de définir la notion d’apprenante comme » ensemble durable de dispositions favorables à l’acte d’apprendre dans toutes les situations « . Il analyse ensuite trois conditions de son essor : comprendre les motivations à apprendre, développer les compétences d’autoformation, déployer une écologie de l’apprenante. Ce sont trois facettes de ce nouveau rapport au savoir sans lesquelles les discours enchantés ou menaçants de la société cognitive et de la formation tout au long de la vie n’auront qu’un impact limité sur les pratiques des sujets sociaux. Cet ouvrage s’adresse aux étudiants de licence, master ou doctorat en sciences sociales ou sciences de l’éducation et aux professionnels de l’éducation et de la formation des adultes (formateurs, responsables de formation et des ressources humaines), ainsi qu’à toutes les personnes intéressées par le devenir des systèmes éducatifs.
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De l’apprendre à l’apprenance
Louvrage de Philippe Carré, L’apprenance, vers un nouveau rapport au savoir, Dunod, 2005, débute par une analyse de la société de linformation, de la montée des investissements immatériels et des espoirs mis dans le développement des industries de la connaissance sappuyant sur une recherche defficience pédagogique dure à cerner. La transformation de la nature du travail qui en découle, conduit à une plus grande mobilisation des ressources personnelles des salariés qui deviennent des travailleurs du savoir, apprenants permanents.
Cette irrésistible ascension du sujet social apprenant implique un rapport au savoir, apparemment plus accessible, transformé. La société est-elle devenue « éducative » ou « pédagogique » avec le risque de tomber dans le travers de linjonction : soyez autonome dans votre façon dapprendre ? Dautant quune société « cognitive » tendrait à reposer sur une sur scolarisation des uns et sur lexclusion des autres, au détriment de l’esprit démocratique dégalité des chances. Sachant que ce sont ceux qui ont déjà le plus bénéficié de la forme scolaire dans leur jeunesse qui profitent au mieux de la formation continue (proche de cette forme scolaire), cest dès l’école quil faudrait développer le goût dapprendre et les attitudes favorables à l’apprenance.
En regard de cette évolution, la formation continue est passée de léducation permanente à vocation culturelle à une formation professionnelle continue dont lorientation socio-économique met laccent sur la notion de compétences à développer par un formation plus individualisée.
La seconde partie de louvrage est construite autour du triptyque :
- vouloir apprendre ou de la motivation, intrinsèque ou extrinsèque
- savoir apprendre par soi-même ou l’apprenance comme disposition pour apprendre
- pouvoir apprendre, vers une écologie de l’apprenance dans le monde du travail, de la Cité et de léducation.
Cependant, il ne suffit pas dêtre informé pour connaître, ni davoir accès au savoir pour connaître. D’où la triple illusion possible de la formation continue dans ses causalités supposées :
Formation – ? -> apprentissage – ? -> compétences – ? -> performance
Il manque un chaînon : l’apprenance, ensemble durable de dispositions favorables à l’action d’apprendre dans toutes les situations formelles ou informelles, de façon expérientielle ou didactique, autodirigée ou non, intentionnelle ou fortuite.
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Apprendre et faire apprendre
Auteur(s) : CHAPELLE Gaëtane, BOURGEOIS Etienne (dir.)
Editeur(s) : PUF
21 €, 304 pages
Année d’édition : 2006 (paru en mars 2006)
Les enseignants et formateurs du XXIe siècle peuvent-ils espérer que la psychologie scientifique les aide dans leur pratique ? Cet ouvrage prend le parti d’affirmer que, même si la science ne peut apporter toutes les réponses attendues, elle peut identifier des conditions nécessaires – mais non suffisantes ! – pour »apprendre et faire apprendre » : des conditions liées aux caractéristiques des apprenants en interaction avec celles de leur environnement d’apprentissage. Les psychologues d’aujourd’hui n’étudient plus l »’Apprentissage » avec un grand »A », comme s’il s’agissait d’un objet défini et statique. Ils préfèrent en décrypter les mécanismes et les dynamiques spécifiques. Leur objet est donc moins »l’apprentissage » qu »’apprendre », verbe d’action qui permet d’intégrer les facettes cognitives, affectives et sociales en jeu.
L’expression »faire apprendre » rappelle par ailleurs que l’action ne se déclenche pas nécessairement d’elle-même. Elle nécessite une implication de l’apprenant lui-même, mais aussi de celui qui lui transmet connaissances et compétences : l’enseignant, le formateur ou tout autre éducateur. Les auteurs ont dès lors choisi de convoquer les sous-disciplines de la psychologie qui, en 2006, peuvent l’éclairer : les neurosciences cognitives, dont fait partie la psychologie cognitive, la psychologie différentielle, qui cherche à comprendre les spécificités individuelles, la psychologie du développement, mais aussi la psychologie sociale et la psychologie de la motivation. En plus d’être collectif, cet ouvrage est donc pluridisciplinaire et fondé sur les travaux de recherche les plus récents, tout particulièrement dans les différents pays francophones.
Table des matières
Introduction. — La recherche sur « apprendre » peut-elle aider à « faire apprendre » ? par Gaëtane Chapelle et Étienne Bourgeois
1. — Les théories de l’apprentissage, un peu d’histoire par Étienne Bourgeois
Première partie : Les mécanismes cognitifs pour apprendre
2. — Un cerveau pour apprendre par Serge Laroche
3. — Un esprit pour apprendre par Michel Fayol
4. — Une ou plusieurs intelligences par Jacques Grégoire
5. — Les différences de cheminement dans l’apprentissage par Jacques Lautrey
6. — Difficultés et troubles des apprentissages par Michel Fayol
7. — Apprendre en participant par Gilles Brougère
8. — Le transfert des apprentissages par Mariane Frenay et Denis Bédard
9. — Des apprenants autonomes ? par Thérèse Bouffard
10. — Construire et mobiliser des connaissances dans un rapport critique aux savoirs par Marcel Crahay et Géry Marcoux
Deuxième partie : Le contexte social pour apprendre
11. — Apprendre en groupe, la classe dans sa réalité sociale et émotionnelle par Pascal Huguet
12. — Mieux comprendre l’inégalité des chances… par Marie-Christine Toczek et Carine Souchal
13. — Les préjugés sur la réussite et l’échec par Jean-Claude Croizet
14. — Optimiser les interactions sociales lors d’un travail de groupe grâce à l’apprentissage coopératif par Céline Buchs, Ingrid Gilles et Fabrizio Butera
15. — Effet-maître et pratiques de classe par Pascal Bressoux
Troisième partie : Motiver et se motiver pour apprendre
16. — La motivation à apprendre par Étienne Bourgeois
17. — Avoir confiance en soi par Benoît Galand
18. — L’image de soi dans l’engagement en formation par Étienne Bourgeois
19. — Le conflit : une motivation à double tranchant pour l’apprenant par Nicolas Sommet, Céline Darnon et Fabrizio Butera
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Faut-il encore apprendre ?
Sandra Enlart, Olivier Charbonnier
Collection: Tendances psy, Dunod
2010 – 208 pages
L’économie de la connaissance connaît une révolution sans précédent. Les modèles traditionnels de l’apprentissage sont totalement bouleversés face au déferlement des savoirs mis à disposition comme jamais. Ce livre tente de dessiner les nouveaux modèles d’apprentissage et explique comment nous allons apprendre demain.
Table des matières : L’apprentissage aujourd’hui. Le choc Internet. Le choc des neurosciences. Les trois mutations majeures dans notre rapport au savoir. Les accès implicite du savoir : jouer, scanner, simutanéïté. Eduquer au traitement de l’information. Quel apprentissage pour demain? Bibliographie.
Biographie des auteurs
Sandra Enlart – D.G. de Entreprise et Personnel (centre de ressources, conseil et formation pour les RH). A publié une dizaine d’ouvrages et participé notamment au « Traité des sciences et techniques de la formation », Dunod, 2e ed. 2007. DEES de psychologie clinique, IEP Paris. Professeur en sciences de l’éducation à l’université de Genève.
Olivier Charbonnier – D.G. de Interface (Etudes, conseil et formation). Sciences Po et ESCP.
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Collaborer pour apprendre et faire apprendre
La place des outils technologiques
Sous la direction de Colette Deaudelin, Thérèse Nault
Collection Éducation – Recherche
Presses de l’Université du Québec – 2003, 296 p.
Les récentes réformes en éducation encouragent le recours à l’apprentissage par les pairs et prônent le développement de compétences liées aux technologies de l’information et de la communication (TIC). Or, depuis au moins une décennie, des formateurs exploitent de nouveaux environnements favorisant les interactions entre apprenants sans toutefois examiner de façon systématique l’apport des nouvelles technologies à ce type d’apprentissage. Dans cet ouvrage, les auteurs présentent quelques designs d’environnement d’apprentissage et étudient l’impact de tels dispositifs sur les nouvelles façons d’apprendre.
Les formateurs pourront y puiser des idées d’activités éducatives. Les chercheurs bénéficieront des dispositifs méthodologiques qui y sont décrits et de la réflexion sur le plan conceptuel à laquelle l’ouvrage accorde une attention particulière. Enfin, les lecteurs, nous l’espérons, pourront y développer le goût d’apprendre en coopération et en collaboration.
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Article de la revue française de pédagogie
Bru Marc. 1988. « Not Louis. Enseigner et faire apprendre (Eléments de psycho-didactique générale)« . Revue française de pédagogie, vol. 84, n° 1, p. 109-112. url :
<http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rfp_0556-7807_1988_num_84_1_2441_t1_0109_0000_2> Consulté le 06 mai 2012
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NOT Louis. Enseigner et faire apprendre (Eléments de psycho-didactique générale). Toulouse : Privat, 1987. 160 p. (Sciences de l’homme).
Réunir dans un ouvrage de taille moyenne (160 pages), une approche théorique de l’acte d’enseigner et de l’acte d’apprendre, une analyse critique des différentes formes pédagogiques et un ensemble de propositions pour améliorer la qualité de l’enseignement relevait de la gageure. Le pari a été tenu. Le livre de L. Not, professeur émérite de sciences de l’éducation constitue une riche synthèse qui ne manquera pas d’intéresser chercheurs et enseignants. L’auteur met à leur disposition de précieuses informations (historiques, psychologiques, pédagogiques) et apporte, dans un domaine où la confusion est cause d’interprétations mal assurées ou abusives, des précisions terminologiques indispensables.
Il n’est certainement pas utile d’insister sur la pertinence du sujet traité : le passé récent et l’actualité montrent combien il est nécessaire de s’attaquer aux multiples réductionnismes dont la didactique est victime.
Dès l’introduction, L. Not rétablit la complexité de la problématique : si la structure des contenus que l’élève doit acquérir mérite à coup sûr une place, elle ne peut fonder à elle seule une didactique. Privilégier les savoirs de façon exclusive, c’est ne pas reconnaître que toute intervention auprès des élèves est toujours réalisée en référence à un système de valeurs, c’est ignorer que l’enseignant s’adresse à une personne en développement, c’est enfin ne pas tenir compte des processus psychologiques à l’œuvre dans tout apprentissage.
Un rapide tour d’horizon des divers modes d’éducation cognitive dévoile des problèmes que certains s’efforcent d’occulter ou que, bien illusoirement, on croit résolus.
Le projet d’un enseignement qui ne serait que simple transmission de connaissances ne résiste pas aux arguments que les acquis de la psychologie génétique permettent de formuler. La connaissance n’est pas l’effet îj’une empreinte que les stimulations sensorielles émanant des choses ou du maître laisseraient dans l’esprit de l’élève. Le constat n’est pas nouveau, il ne suffit pas d’enseigner (au sens de fournir de l’information) pour que les élèves apprennent.
La question se pose alors de savoir si la propre expérience de l’élève suffit pour assurer l’apprentissage des savoirs culturellement valorisés. Le projet de l’Ecole dite Nouvelle était certes généreux ; il s’agissait de libérer l’enfant d’une excessive soumission à l’autorité magistrale et de favoriser ainsi son inventivité. Ainsi a-t-on parfois pensé que l’élève pouvait s’instruire lui-même. Apprentissage direct par observation, apprentissage à travers les expériences que les besoins éprouvés suggèrent, récapitulation à l’échelle individuelle des expériences de l’humanité ne sont pas pour L. Not des solutions pédagogiques acceptables ; elles se heurtent rapidement à des limites difficiles à franchir : les besoins de l’élève ne fournissent pas toujours une orientation cohérente à la découverte des notions, certains contenus ne sauraient être réinventés, l’expérience courante est bien souvent soumise à de multiples sollicitations…
Pour sa part, la systématisation proposée par les promoteurs de l’enseignement programmé n’est pas adaptée à tous les contenus d’apprentissage et à toutes les visées éducatives. La solution reste donc bien partielle.
Il est devenu indispensable de renouveler la pédagogie de la connaissance. L’auteur formule une solution, il propose une méthode génético-structurale d’élaboration cognitive. Cette méthode s’inspire nettement de la conception piagétienne selon laquelle connaître un objet, c’est agir sur lui et le transformer. Mais au-delà d’une interprétation étroite des travaux de Piaget, il s’agit de considérer que les contenus cognitifs constituent des objets au même titre que les objets concrets. Un renversement de la perspective classique peut alors être envisagé : l’acte d’apprendre devient central, c’est par rapport à lui qu’il faut définir l’enseignement.
La suite de l’ouvrage est ainsi consacrée à la présentation des conduites d’apprentissage et des conduites d’enseignement.
Si apprendre, c’est construire des représentations et développer des comportements de construction, de reconstruction ou de transformation des objets matériels et symboliques, l’organisation de l’enseignement devient une recherche des conditions qui suscitent et facilitent ces activités d’apprentissage. L’étude analytique de la démarche d’apprentissage peut alors fournir les éléments d’une meilleure adaptation de l’enseignement aux besoins des apprenants.
L’élève est confronté aux informations qui circulent dans son environnement social et scolaire ; ces informations resteront des bruits tant qu’elles n’auront pas été intégrées par le système de signification de chaque sujet.
L’appropriation active passe par la mise en œuvre de procédures de traitement de l’information, procédures parmi lesquelles la perception, le décodage des significations, l’évaluation critique, la transformation et la combinaison d’informations occupent une large place.
Mais apprendre ce n’est pas seulement agir sur les informations immédiatement disponibles, c’est aussi découvrir et produire des informations nouvelles, les comparer et les organiser. Selon ses possibilités intellectuelles, l’enfant ou l’adolescent adopte des démarches méthodologiques qui lui sont propres et, stimulé par son environnement, parvient à des structurations cognitives toujours plus performantes.
L’utilisation et la mémorisation des informations ne saurait être considérée comme secondaire même si elles apparaissent aux yeux de beaucoup comme des activités moins nobles. Savoir appliquer une connaissance de façon pertinente suppose que cette connaissance soit bien mémorisée et qu’elle participe d’un système classificatoire qui permet d’apprécier son adéquation à la situation sur laquelle on souhaite agir.
Pour L. Not, il ne fait aucun doute qu’enseigner c’est faire agir sur l’information et faire produire de l’information. Il importe avant tout de trouver les moyens susceptibles de permettre à chaque élève de s’engager dans une démarche d’apprentissage. En ce domaine, il n’existe certainement pas de solution qu’il suffirait de reproduire. L’incitation des activités d’apprentissage n’est jamais aussi facile qu’il y paraît ; s’il suffisait de donner des consignes pour que tout un chacun soit motivé pour apprendre, il ne serait pas utile d’épiloguer longuement sur le problème du choix des moyens pédagogiques.
Ici aussi, l’examen des différentes conceptions et des différentes pratiques conduit à la nécessité de rechercher des moyens compatibles avec une perspective génético-structurale.
Vouloir fonder la motivation sur les sanctions, l’émulation ou l’attrait comme le font les méthodes traditionnelles ou traditionnelles rénovées, c’est le plus souvent ignorer que l’élève est un sujet capable d’agir de sa propre initiative.
Mais vouloir organiser l’enseignement autour de l’intérêt ou des besoins liés à la vie de l’élève, c’est réduire singulièrement les possibilités et renforcer parfois les effets des déterminismes sociaux. C’est ailleurs qu’il faut chercher les ressorts de l’apprentissage.
L’auteur propose une prise en compte du désir de l’apprenant à se dépasser et à vaincre les limites que lui impose son état de dépendance. Assimilations et accommodations réussies deviennent source de joies et dynamisent fortement l’activité d’apprentissage. Si l’école permet à chacun de construire des projets à court et moyen termes organisés en référence à un projet de vie plus général, elle atteindra son but sans avoir recours à des pratiques qui oscillent le plus souvent entre la coercition et la démagogie.
Le choix d’une perspective génético-structurale impose une révision des modes de groupement des élèves. L’enseignement simultané n’est certainement pas la solution unique. On aurait cependant tort de penser que le travail individuel doit alors devenir la règle. L’auteur rappelle fort judicieusement que l’on ne saurait confondre travail individuel et travail individualisé. Le premier est réalisé en l’absence d’interactions sociales mais n’est pas forcément adapté au sujet alors que le second n’exclut pas le travail de groupe pourvu que ce dernier corresponde aux caractéristiques personnelles de l’élève.
Le dernier chapitre aborde le problème de l’échec de l’apprentissage. Thème de réflexion important, qui depuis plusieurs années fait couler beaucoup d’encre… Doit- on penser que L. Not se livre à un discours trop général qui, avec les meilleures intentions, ne fait qu’ajouter à l’inflation des commentaires en tous genres qui n’arrivent pas à dépasser le lamentable constat d’inefficacité du système éducatif ?
Les solutions actuelles sont vivement critiquées. Les unes ségrégatives, consistent à séparer ceux qui paraissent inaptes à poursuivre leur scolarité selon le cursus reconnu normal par le système scolaire et la société. Ces élèves sont généralement placés dans des classes ou des circuits spécialisés dont on sait qu’ils conduisent le plus souvent à une impasse. Les autres, intégratives, procèdent selon le mot de l’auteur, d’une excellente intention mais, l’intégration, lorsqu’elle est réelle, ne va pas sans problèmes et les risques de dérive vers une ségrégation à moyen terme ne sont jamais négligeables…
L. Not cherche résolument à dépasser la difficulté en s’appuyant sur les principes théoriques préalablement explicités : le point de vue génético-structural permet de prendre en compte l’inégalité des vitesses du développement intellectuel et l’influence sur ce développement des objets et des situations proposés à l’activité intellectuelle. Ainsi, son propos ne se limite pas à un constat désabusé. Des propositions sont avancées : tolérance à la lenteur du développement, exploitation de tous les modes de fonctionnement mental et didactique de détour constituent un ensemble de moyens nouveaux grâce auxquels l’enseignement devrait dépasser les problèmes dans lesquels il s’enlise. Le lecteur aurait sur ce point souhaité trouver quelques exemples plus détaillés ainsi qu’une évaluation des pratiques organisées selon les principes exposés. Le problème de l’échec des apprentissages est si crucial et si complexe qu’il faudrait lui consacrer plus d’un chapitre.
Mais on ne saurait regretter que la volonté de s’engager vers des propositions constructives ait chez l’auteur, pris le pas sur le désir de produire un exposé plus étendu. Certes les perspectives ouvertes par les nouvelles applications de l’informatique à l’enseignement auraient pu être analysées comme moyen de dépasser les insuffisances de l’enseignement programmé classique ; la notion de méthode en pédagogie, aurait pu faire l’objet d’une critique épistémologique plus approfondie ; une étude des différentes théories de l’apprentissage aurait pu trouver sa place dans l’ouvrage ; les modèles pédagogiques présentés en annexe auraient gagné à être assortis d’un exposé de leurs conditions d’émergence… Là n’était pas le projet de L. Not. Il a préféré préserver la vigueur de son propos et insister sur l’intérêt d’une perspective génético-structurale. L’objectif est atteint. Le lecteur, praticien ou chercheur, ne pourra que se féliciter de trouver dans ce livre, posés avec la plus grande clarté, les principaux problèmes qui préoccupent aujourd’hui la didactique. Que souhaiter de mieux lorsque, de plus, des propositions réalistes et rigoureusement fondées ouvrent d’encourageantes perspectives ?
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Apprendre et faire apprendre, un défi majeur pour l’école
source: <http://www.unsa-education.org/modules.php?name=News&file=article&sid=839>
Motiver et faire travailler efficacement les élèves est devenu un enjeu décisif. Des chercheurs travaillent à cette question et cherchent à « améliorer l’école ». C’est le cas de Gaëtane Chapelle, docteur en psychologie et chercheur au CNAM, qui a récemment co-dirigé deux ouvrages importants, « Améliorer l’école » et « Apprendre et faire apprendre« , publiés aux PUF. Entretien.
Le débat sur l’école a mis en évidence l’une des défis majeurs posés à notre système éducatif celui de motiver et faire travailler efficacement les élèves. Les connaissances en psychologie, sur « apprendre » peuvent-elles aider les professionnels de l’école à « faire apprendre » ?
La recherche scientifique en psychologie ne peut pas proposer de recettes toute faites. Car « faire apprendre » est un problème d’action, toujours situé dans un environnement particulier, dans une relation unique entre un enseignant et ses élèves, entre les élèves et le savoir, entre l’enseignant, les élèves et l’Ecole. Mais il est vrai que les connaissances scientifiques sur les mécanismes en jeu pour « apprendre » peuvent servir de grille de lecture de ces situations uniques. Ces savoirs peuvent alors participer à la construction de l’action pédagogique.
Prenons un exemple (1) : la psychologie cognitive a bien établi le rôle de l’attention dans le processus de mémorisation, d’apprentissage. L’attention est indispensable, mais les capacités attentionnelles sont limitées, chez chacun d’entre nous. C’est pourquoi nous ne pouvons pas facilement faire deux choses en même temps. La psychologie sociale a quant à elle démontré que nous nous jugeons nous-mêmes en nous comparant aux autres. Enfin, la psychologie de la motivation souligne le besoin fondamental d’estime de soi. Que faire de ces connaissances pour interpréter une situation pédagogique habituelle, lorsqu’un enseignant propose un problème arithmétique à voix haute et demande que le premier qui a la solution lève le doigt ? L’élève qui se sait très lent dans cet exercice consacrera une grande partie de son attention à s’inquiéter de sa lenteur, de l’image qu’il donnera aux autres de ses difficultés, et ne pourra résoudre le problème. Connaître les mécanismes en jeu ne veut pas dire qu’il ne faut pas proposer ce genre de situation aux élèves. Non, mais cela permet d’en anticiper certaines conséquences.
Quelle organisation pourrait rendre l’école plus efficace pour tous les élèves ? L’autonomie pédagogique a-t-elle un rôle déterminant ?
Si les sciences sociales pouvaient répondre simplement à cette question, cela fait longtemps qu’on ne débattrait plus sur l’école et son organisation. Mais cela ne veut pas dire non plus qu’elles ne peuvent rien en dire. Les recherches scientifiques montrent que dans un contexte semblable, certaines approches pédagogiques, certains établissements, certains systèmes éducatifs peuvent produisent des élèves faibles moins faibles, des inégalités sociales moins élevées. Mais pour obtenir de tels effets, il faut une connaissance fine et précise de l’école et de ses transformations. Prenons comme vous le proposez la question de l’autonomie pédagogique : la comparaison du niveau de décentralisation des systèmes éducatifs de plusieurs pays de l’OCDE que propose Nathalie Mons (2) suggère qu’il faut dépasser l’opposition traditionnelle entre un système éducatif très centralisé et peu performant et un système éducatif décentralisé et efficace. Les choses sont plus complexes : ce qui est efficace, c’est de confier le bon type d’action à chaque niveau de pouvoir. Par exemple, pour la conception des programmes, le plus efficace est de confier à l’Etat régulateur la définition des objectifs pédagogiques, et aux établissements scolaires la définition détaillée des programmes, comme en Finlande, en Nouvelle-Zélande et au Royaume-Uni. À l’inverse, une conception centralisée des programmes scolaires, comme en France, est peu performante.
Vous faites l’hypothèse dans l’un des ouvrages que vous coordonnez qu’« Il suffirait de presque rien » pour « améliorer l’école ». Quelles politiques, quels acteurs permettraient de construire ce scénario optimiste ?
Nous avons fait cette hypothèse, Denis Meuret et moi-même, car la richesse et la complexité des savoirs produits sur l’Ecole par les sciences humaines et sociales démontrent que l’amélioration de l’école procédera davantage de petits progrès successifs que d’un changement radical. Mais surtout, la recherche sur la transformation des systèmes éducatifs et des pratiques pédagogiques montre qu’il faut fournir aux acteurs de terrain, à tous les niveaux de pouvoir, une panoplie toujours plus riche de dispositifs, d’outils à l’efficacité vérifiée. Ils pourront alors choisir celui qui leur paraît le plus pertinent, et pourront débattre en fonction de leurs valeurs, des missions qu’ils assignent à l’Ecole. Il faut donc bien sûr faire un grand effort de formation et d’information des acteurs de terrain, mais également leur rendre possible l’évaluation des effets de leurs choix, ainsi que le recours à des dispositifs d’aides ou de pression pour enrayer les « spirales de déclin ». Nous faisons le pari qu’un système d’incitation est efficace s’il engage les acteurs à trouver eux-mêmes ce qui convient à la situation de leur classe, de leur établissement, et donc aussi à réclamer à leurs tutelles les ressources, les formations, l’aide qui leur serve véritablement à mieux faire apprendre les élèves.
(1) Voir l’ouvrage « Apprendre et faire apprendre », dirigé par Etienne Bourgeois et Gaëtane Chapelle, Collection Apprendre, PUF, 2006.
(2) Paru dans « Améliorer l’école », dirigé par Gaëtane Chapelle et Denis Meuret, Collection Apprendre, PUF, 2006.
Didactique professionnelle
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Apprendre, c’est trouver un chemin vers son cerveau… Apprenons à apprendre !
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Former les enseignants à faire apprendre tous les élèves